Intervention au Colloque International de Sociologie de Tours

lugguyguy Par Le 14/06/2016

Proposons un accompagnement des enseignants et des élèves sur une alternative à la morale traditionnelle par une éthique scolaire minimale & un éveil à la spiritualité laïque en élémentaire.

 

ÉTHIQUE MINIMALE & SPIRITUALITÉ LAIQUE HUMANISTE EN ACCOMPAGNEMENT ÉDUCATIF AU XXIe SIÈCLE  

 

LHEUREUX_Guy     AECSE -ANGERS -France    lheureuxguy_2000@yahoo.fr

 

Résumé : Notre société fait face à une violence caractéristique, face à un individualisme croissant et un chacun pour-soi développé : il en résulte une demande d’éthique issue des parents et de l’administration, un délitement de l’autorité, et l’accentuation de la délinquance chez les élèves. Aussi proposons-nous, -en alternative à la morale traditionnelle-, une éthique scolaire minimale & un éveil à la spiritualité laïque, ainsi qu’un rapprochement entre les concepts de sacré et laïcité : cet accompagnement peut s’envisager tant pour les enseignants que pour les enfants afin d’améliorer le vivre-ensemble, réapprendre laïcité et démocratie, éveiller aux valeurs humaines, réapprendre le calme et le sacré dans la perspective d’une pédagogie de la bienveillance. Afin d’éviter ici le déploiement d’une proposition abstraite & trop utopique, nous avons proposé des actions éducatives concrètes et sollicité l’avis de plusieurs centaines de professeurs d’école.

Mots clés : accompagnement éducatif, éthique scolaire, spiritualité laïque, sacré, éducation morale, valeurs humaines, humanisme & enseignement.    Nombre de signes et d’espaces : 28780.

 

 

- PROPOSITION DU CHERCHEUR[1] -

-1. Un accompagnement par une éducation vers une éthique scolaire minimale :                                              

1A. Les maîtres doivent pouvoir restaurer une éducation à la laïcité. En dehors de tout contexte religieux et de l’influence de tout dogme, les enfants seront initiés et informés sur le sens et les valeurs de la laïcité, grâce à une éducation civique liée à des lectures, des débats où l’éveil à une première réflexion philosophique sera développé avec des situations concrètes proposées à la réflexion échangée entre enfants.

1B. Un éveil scolaire à la démocratie et au dialogue mutuel démocratique pourra être mis en place quotidiennement dans toutes les écoles.       Cet éveil à la démocratie active peut s’effectuer par l’exploitation de situations vécues dans l’école ou les lectures, ou rapportées de médias dans le cadre des échanges et débats civiques et philosophiques à l’école. Il peut également être envisagé de manière transversale afin que chaque discipline soit l’occasion de rappeler les règles et les principes essentiels du fonctionnement démocratique tant à l’école que dans la société, l’actualité pouvant être utilisée aussi dans les débats quotidiens. L’ouvrage de Laurence Loeffel[2] peut être usité par les pédagogues dans ses aspects et suggestions pratiques. Aussi l’éducation à la citoyenneté au travers des études des fonctionnements et règlements, mais aussi l’incitation à la vraie participation à des actions collectives permettront, comme le suggère ce mémoire montpelliérain[3], d’initier les enfants et adolescents à une authentique participation citoyenne. Dans le cadre d’une pédagogie coopérative, l’initiation des élèves peut être réfléchie en pédagogie Freinet avec l’aide des conseils de coopératives, comme le propose H.L. Go dans son livre sur l’école de Vence (Vers la reconstruction de la forme scolaire, PUN, 2007).

1C. Les interdits fondamentaux pourront faire l’objet d’un enseignement moral nécessaire et rigoureux dans chaque classe pour les réapprendre.  Les tabous minimums et les interdits fondamentaux doivent être étudiés et rappelés, faire l’objet de séquences d’éducation morale avec exemples précis et concrets afin que tous les enfants les connaissent pour mieux les respecter et les inclure et intérioriser dans leur comportement quotidien. Cet éveil nécessite des explications et des exemples présentés et illustrés avec une langue et des mots simples compréhensibles par tous les élèves. Rappelons donc des interdits universels et fondamentaux : - d’abord, l’interdiction de tuer et l’obligation de respecter la vie d’autrui ;  de plus, -l’interdiction absolue de l’inceste ; -enfin, l’interdiction absolue de se manger entre hommes. On peut y ajouter d’autres interdictions qui devraient devenir fondamentales dans l’avenir en milieu scolaire : le respect de l’intimité des corps aux toilettes ; l’interdiction de voler les affaires des autres ; le respect absolu du corps de l’autre, quelque soit son sexe ; racisme, discrimination et ostracisme.

 1D. Une rééducation aux règles du vivre-ensemble et stratégies pratiques d'amélioration comportementale est indispensable pour faire diminuer la violence entre enfants. 

-Cette éducation peut être envisagée grâce à des ateliers de premières réflexions philosophiques en milieu scolaire, où des thèmes comme la violence, l’obéissance des enfants aux adultes, le respect mutuel des adultes envers les enfants et des enfants envers les adultes ; les stratégies pour apprendre l’autodiscipline ; qu’est-ce que l’autonomie pour un enfant ; etc.

-L’enseignement peut être centré sur la formation du caractère et sur l’amélioration du comportement à partir de débats sur des situations où des élèves ont pu agresser ou frapper des camarades. Il s’agit là aussi d’aider les élèves à apprendre le savoir-être ensemble en rappelant les lois internes à l’école, en établissant des contrats écrits pour le vivre-ensemble, autorité et respect mutuel, en apprenant aux élèves comment on peut acquérir des habitudes de réactivité pour éviter toute forme de conflit, en apprenant aux enfants volontaires la fonction de médiation, etc. N’oublions pas qu’il existe des Chartes de Respect Mutuel dans quelques écoles et collèges.                                                                                                                               

       
-2. Un accompagnement lié à un éveil à une spiritualité laïque comme ensemble de propositions pratiques & concrètes dans la pédagogie d'aujourd'hui et l'éducation de demain :                         

2A. La spiritualité laïque proposée à l’école : de quoi s’agit-il ? Il est nécessaire de rappeler de quoi on parle ici. Une spiritualité sans dogme ni religion ; une disposition d’esprit qui permet d’ouvrir son cœur et ses qualités de cœur ; une façon d’être et de se comporter en respectant les valeurs humaines et humanistes ; une richesse intérieure qui permet de…se positionner davantage dans l’être que dans l’avoir, dans le respect de la nature que dans la consommation engendrant pollution, un esprit ouvert aux valeurs de l’humanisme plus qu’à l’individualisme, la vie et le calme intérieurs plutôt que le paraître et le clinquants extérieurs… On peut ajouter le respect de ce qui est « sacré » et « laïc » (cf. 2G.)

Patrick Viveret[4] précise : « La spiritualité laïque n’est pas l’apanage des croyants. Il y a des spiritualités agnostiques et des spiritualités athées. Ce qui les réunit ? La conviction que la finalité humaine n’est pas l’acquisition de richesses, ni même la survie, mais la réalisation d’un projet de vie habité de sens. »

2B. Une ouverture des qualités de cœur des élèves.  Il y a là un besoin d’accompagner les enseignants et les élèves, les parents et les cadres, pour faire évoluer les paramètres et paradigmes de l’éducation et du comportement. La société contemporaine diffuse sa violence en permanence à chaque moment de notre existence, et l’un des moyens de refuser cette violence et de lutter pour que les caractères et comportements enfantins soient le plus possible exempts de violence, c’est d’abord l’ouverture des qualités de cœur des élèves.   Il s’agit de ne plus privilégier le mental et l’égo, mais de développer la sensibilité. Réapprendre à s’émerveiller, par exemple. Il s’agit aussi d’éveiller la sensibilité des élèves à respecter le sacré et la nature. Il s’agit de développer des qualités qui favorisent plus le vivre-ensemble que le chacun pour soi.  Les maîtres doivent également apprendre à favoriser le savoir-être vis-à-vis des savoirs eux-mêmes, faute de quoi, la violence, l’individualisme, et la société de consommation et de la rentabilité risquent de continuer à imprégner leurs cancers et leurs sidas tels ceux de la convoitise, du toujours plus, du paraître, du consumérisme à tous crins. Les valeurs humanistes et les qualités de cœur semblent plus essentielles dans la construction des citoyens que les valeurs marchandes, le culte de l’argent ou de la richesse matérielle.

2C- Un éveil aux valeurs humaines transversalement aux disciplines scolaires. Les valeurs humanistes et humaines en tant que champ d’enseignement et d’éducation sont approuvées par une moyenne entre 89 et 97% d’enseignants élémentaires dans notre enquête nationale. Quelles valeurs sont-elles candidates à représenter une authentique spiritualité laïque, et que les maîtres, en accompagnement de l’échafaudage de leurs élèves, peuvent éveiller en leurs jeunes consciences pour ces valeurs capitales ? D’abord l’esprit de paix, que nous découvrons être enseigné depuis 40 ans dans les EIP[5] (Écoles Instruments de Paix), et qui est reconnu comme valeur universelle dans un grand nombre de pays et de philosophies. Mais aussi toutes les valeurs liées à la fraternité, valeur emblématique française qui ne faisait pas partie des programmes ni des IO depuis plusieurs générations : solidarité, entraide, coopération, écoute empathique, démocratique et mutuelle, attention aux autres, serviabilité spontanée, service entièrement désintéressé : dans combien de matières ou de discipline, dans combien d’écoles ces valeurs humanistes sont-elles enseignées et éduquées au sein du système éducatif français ?  Il n’est jamais trop tard pour bien faire…même si un travail considérable est à accomplir tant dans l’accompagnement des enseignants (formation initiale) que celui des enfants, des familles (éducation scolaire et populaire).

2D- Quelles autres valeurs humaines à éveiller chez les enfants (à l’école et à la maison) et chez les professeurs (formation initiale et continuée) ?  La bienveillance, la vérité, la non-violence, la conduite juste, la rigueur morale, le respect mutuel, l’honnêteté et la droiture, la discipline, et toutes les valeurs en lien avec le non-racisme : la tolérance, le respect des différences, l’ouverture d’esprit. Mais aussi et encore la joie, la beauté, l’émerveillement, la sobriété[6] et la modération … ou encore le respect de l’environnement et de la nature, de l’eau, de la terre, de l’air. Nicolas Hulot pense que la Mutation Verte exige que nous percevions la nature comme sacrée. Mais n’oublions pas non plus les valeurs humaines véhiculées par le yoga traditionnel et la philosophie de Patanjali : la modération, la non-avidité & la non-convoitise, la tempérance, l’authenticité et la vérité envers soi, la sincérité. Sans oublier le contentement et la sobriété ainsi que le discernement.

2E. Des pratiques pédagogiques à instaurer dans les classes : assise silencieuse, le yoga traditionnel adapté aux scolaires. En effet, la pratique du yoga scolaire dans 600 classes françaises montre une régression de la violence et des actes délictueux (baisse de 96%)   Elle est acceptée par 72% des maîtres interrogés (25% NSP). Les élèves sont plus calmes, l’autorité des adultes mieux respectée, les résultats scolaires bien meilleurs, des enfants mieux centrés & plus attentifs, des comportements et attitudes enfantines[7] davantage en lien avec les valeurs d’entraide, de solidarité et de fraternité. Le M.E.N. a reconnu l’an passé les bienfaits du yoga traditionnel en classe, et accepté d’encourager sa pratique en milieu scolaire.

L’assise silencieuse permet de réapprendre aussi le calme intérieur, rééduquer à se centrer sur une seule chose pour guérir le papillonnement des attentions, et le zapping permanent qui empêche de se centrer sur l’essentiel. En Suède, cette pratique en classe a grandement permis les meilleurs résultats scolaires dans l’échelle européenne des comparaisons intellectuelles enfantines. Un ouvrage permettant aux enfants de se centrer en restant en silence a été distribué à toutes les écoles par le ministère de l’éducation.[8]…Le yoga et l’assise silencieuse permettent d’apprendre à vivre « dans le moment présent », tant aux adultes qu’aux enfants. Eckart Tollé nous rappelle qu’entrer dans cet espace silencieux et intemporel nous permet de prendre conscience que nous ne formons qu’un entre cet espace et nous-mêmes, et que nous sommes cette conscience éternelle à la base de toute création. Regrettant que la plupart des êtres humains n’établissent que rarement ou jamais un lien ou un contact avec cet espace, E. Tollé écrit[9] : « les personnes ne se préoccupent que de la forme, intérieure ou extérieure. Elles cherchent à combler le silence avec des pensées, des mots, des choses, des interprétations, des définitions, des jugements ! C’est comme si elles vivaient dans une pièce remplie d’affaires, une condition horrible que Bouddha qualifiait de souffrance. » Pour E. Tollé, le calme ne consiste pas en une simple absence de bruit. « Il est l'essence de toutes les galaxies et de tous les brins d’herbe ; de toutes les fleurs, de tous les arbres, de tous les oiseaux et de toutes les autres formes."[10] En accédant à ce calme intérieur, nous nous alignons sur le pouvoir et l'intelligence de la vie elle-même. Dans cet état, il n'y a ni souffrance, ni peur, juste une source d'amour, de joie et de paix intensément vivante. 

2E. Les arts martiaux réguliers à l’école (Aïkido, Judo, Tai-Chi-Chuan, etc.) Ces pratiques, régulièrement actées et vécues régulièrement en classe, permettent d’améliorer le vivre ensemble, de faire diminuer la violence, de permettre une restauration des autorités magistrales, de mieux respecter les lois internes de l’école, et d’être plus épanoui en tant qu’être scolaire… Ce sont les constats effectués par les enseignants, les intervenants extérieurs & les parents d’élèves. Mais n’oublions pas les bienfaits liés aussi aux comportements, aux résultats scolaires meilleurs, au mieux-être en classe, réapprendre le respect mutuel entre enfants, etc.

2F -apprentissage de la CNV au sein des écoles élémentaires. Comment vouloir la paix et la non-violence si nous ne les apprenons pas aux élèves de nos classes ? Dans plusieurs pays, comme la Suisse ou la Norvège les enfants apprennent la Communication Non-Violente, stratégie de relation et d’expression permettant de désamorcer toute intention de violence et d’agressivité chez les adultes et les enfants, respectant les basiques proposés par Marshall Rosenberg[11]. Les enseignants peuvent s’inspirer des livres de ce créateur international, ou de Thomas d’Ansembourg[12], et suivre les formations proposées aux enseignants du primaire comme la fédération CNV Loire-Atlantique qui propose stages et outils pour les maîtres depuis longtemps, de même que l’université de Paix de Genève, qui forme les maîtres scolaires depuis plusieurs dizaines d’années. Apprendre à écouter, à comprendre les besoins des autres enfants ou des adultes, exercer de l’empathie, se mettre à la place de l’autre plutôt qu’avoir raison, les enfants savent apprendre et savent faire, nous rapportent nombres d’enseignants en Grèce, en Norvège ou en Suisse, Belgique ou Finlande. Cet éveil à la CNV n’est pas compatible avec un système d’évaluation et de notation qui sème ce que certains auteurs nomment violence ordinaire (jalousies, frustrations, esprit de compétition, sont en désaccord avec l’esprit de paix). « Eduquer sans récompense ni punition » de J.P. Faure[13] va plus dans le sens d’une pédagogie de bienveillance que vers un système capitaliste où chacun doit être le meilleur et le plus fort, brillant, etc. qui paraît loin du ré- enchantement de l’école.

2G. Un éveil scolaire au "sacré" en lien avec la laïcité. Nous avons besoin, pour accompagner la construction enfantine de la personnalité et du comportement, de réapprendre le sacré laïc aux élèves des écoles. En effet, le concept de « sacré » n’est pas forcément lié à un dogme ou à une religion. Toute attitude ou tout comportement qui traduit un immense respect n’a rien de religieux dans les habitudes françaises. Le respect du corps d’un enfant par un enfant ou un prêtre ou un éducateur, c’est de l’ordre du sacré. Les personnes qui vous ont donné la vie, qui vont ont fait exister en tant qu’être humain : cela relève du sacré, pour moi en tant que chercheur après avoir interrogé des centaines d’adultes pendant 20 ans. Le respect dû aux personnes âgées, celles qui ont tout donné toute leur vie durant, pour la société, pour leurs enfants, pour leur environnement, ce respect aux vieillards est de l’ordre du sacré. Dans la nature aussi, le sacré existe, les hommes et les enfants l’ont quelquefois oublié, craignent les sociologues et philosophes de l’environnement : l’éco-spiritualité nous rappelle que la terre, l’eau, l’air sont sacrés. Par exemple, Comment peut-on remplir l’eau ou l’air avec du plutonium avec des centrales nucléaires mal contrôlées, que fait-on de la santé des français ? L’air qu’on respire, l’eau que nous buvons ne sont-ils pas sacrés, et donc éminemment respectables ? Les couleurs et les pigments sur les ailes des papillons sont sacrés, aussi devons- nous apprendre aux élèves de ne pas toucher leurs ailes, car ce geste les condamne à mort. Apprendre à reconnaître et respecter le sacré, c’est aussi redéfinir l’essentiel, l’important, le sens de notre vie, le « plus que respectable », etc.

In fine, pourquoi se passer de ces pratiques nouvelles et anciennes en Europe et qui apportent les résultats que l’on sait ? Une pédagogie de la bienveillance, une prédominance du savoir-être sur le cumul des connaissances, un éveil des qualités de cœur, un apprentissage des valeurs humanistes et humaines en lien transversal avec les différentes disciplines, l’introduction de pratiques nouvelles en pays cartésien, une sensibilité et une créativité plus développées, toutes ces suggestions pourraient faire évoluer la santé de notre école et améliorer les résultats. Et si nous essayions en France ?

-3. Ces choix et propositions sont approuvés par 320 professeurs dans une enquête nationale.

Quelques exemples de résultats relevés dans la recherche, et résumés par les schémas qui suivent résultent de l’enquête nationale :

a- Les activités et les valeurs choisies par les maîtres :  Les instituteurs  et professeurs des Écoles interrogés acceptent largement une spiritualité laïque (75%), de même une pratique du yoga scolaire (72%), un éveil aux valeurs humaines (92%),  mais aussi l’apprentissage de la CNV (85%) …ou encore l’initiation à des débats en philosophie sur sujets simples (81%) !

b. Les valeurs privilégiées sont les qualités de cœur (91%), le respect sous toutes ses formes (93%) la fraternité (75%), la coopération (82%) 

c. Voici des exemples sous forme de tableaux : 

VALEURS HUMAINES CHOISIES ET CLASSEES PAR LES MAITRES

 

VALEURS RETENUES PAR LES MAITRES POUR LA SPIRITUALITE LAIQUE

 

-4. Références de la recherche présentée :

-a. Thèse : voir université de Lyon et université de Rennes à l’adresse suivante : https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00775897/document/ (téléchargements internautes : 4201 fois en 18 mois)

-b. Ouvrage : voir fiche auteur aux éditions Harmattan, à l’adresse où divers articles sont publiés (participation à des colloques, articles sur revues et sites) :

http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=auteurs&obj=artiste&no=25890

 

-5- Conclusions :

 

  1. Urgence d’ouvrir notre philosophie éducative ! Il est souhaitable de considérer l’éducation d’aujourd’hui avec une plus grande ouverture : c’est ce que pensent aussi des chercheurs, comme Philippe Filliot ou Eckart Tollé. Un enseignement et une éducation débarrassés de leurs préjugés, de leurs frilosités, qui ne soient plus sourds au domaine de la spiritualité laïque, et qui s’ouvrent vers d’autres façons de penser, de sentir, d’apprendre, de réfléchir et de chercher.

Il est non utopique et urgent, m’ont déclaré des auteurs, tels Michel Serres, Edgard Morin ou Pierre Rabhi, que l’éducation nationale en France s’honorerait à mettre en place un éveil transversal à la spiritualité laïque. Il en est de même de la proposition faite pour une éducation aux valeurs humaines dans toutes les écoles de métropole, publiques et privées.

 

  1. Repenser les fonctions de l’école et du maître ! Il est souhaitable de repenser les objectifs de l’éducation vers un meilleur équilibre entre les savoirs et les savoir-être, entre l’empilement des connaissances et la formation du comportement et du vivre ensemble. Aussi l’école d’aujourd’hui et de demain se doit-elle de ne plus se laisser imprégner et costumer par les cancers et les sidas de la société. Les ESPE pourront former et construire les futurs maîtres sur ces idées simples et concrètes permettant de réconcilier les enfants avec l’école. Le MEN serait bien inspiré d’accompagner Maîtres et Professeurs en reconsidérant les formations et les programmes ! Arrêter de comparer, d’évaluer, de juger, de punir, de récompenser, d’humilier, de ségréguer, de noter ou de séparer en rangeant les élèves dans des cases, etc. Mais les suggestions pour former les futurs enseignants ne manquent pas, telles la transversalité de l’éthique en classe, les nouvelles pratiques : réfléchissons aux futures recherches pour la suite.

 

  1. Est-ce utopique que de repenser l’ensemble du système ? En se contentant d’invoquer la réussite « scolaire » comme horizon suprême, on évite de se poser la question toute aussi essentielle de savoir si cette réussite a aussi à voir avec « la réussite humaine » qui en appellerait à des critères relevant de dimensions relationnelles, éthiques et spirituelles. Certes, on évoque dans les textes officiels, parmi les objectifs et missions de l’école, « l’épanouissement de la personnalité de l’élève » et des valeurs collectives comme « la solidarité et la coopération ». Mais ce discours paraît relever d’une rhétorique[14] bien rodée, qui affecte peu en vérité les pratiques ordinaires de l’école.

Ainsi, en haut lieu innovateur, à vouloir conquérir un peu de cette réussite humaine sans renoncer aux valeurs de la compétition et de la concurrence généralisée - ces restes de barbaries « douces » - on ne soulève guère la contradiction. Car à quelles conditions les innovations sont-elles susceptibles d’entamer le système scolaire dans ses fondements d’injustice, de ségrégation et de désespérance ? La transformation en profondeur du système scolaire ne doit pas oublier au passage la transformation des pédagogues[15] et des éducateurs, pour qu’ils puissent acquérir la « maturité » psychologique, et surtout éthique, sans laquelle l’innovation ne produira jamais que des effets de surface.

La violence sociale essaime partout dans l’école et dans la jeunesse, comme l’indiquent d’une façon inquiétante les statistiques de la montée de la délinquance juvénile en Europe et en France. L’éducation à la frustration dès le plus jeune âge semble poser problème. De plus les parents souhaitent très souvent que ce soit l’école qui assure l’éducation morale et la forge de bonnes habitudes sociales et humaines…La demande d’éthique est forte dans notre société, comme en entreprise. Les enfants semblent -souvent- laissés à eux-mêmes concernant les écrans, la télévision, les téléphones portables, les jeux vidéo. Malgré les cris d’alarme de penseurs comme Bernard Stiegler, auteur de La télécratie contre la démocratie[16], rien ne semble réellement se dessiner, ni au niveau des pouvoirs politiques, ni au niveau des autres pouvoirs (justice, administration, religions, médiatique, etc.) L’économie n’aurait donc pas intérêt à respecter les enfants et les adolescents, car elle perdrait des marchés et des milliards, et ce n’est pas la préoccupation des entreprises et de l’économie que de veiller à l’équilibre, au bon épanouissement des enfants, ni à l’avenir de leur santé mentale, ou psychologique.

 …Mais il nous faut comme chercheur et être humain, garder espoir coûte que coûte, et croire en l’homme, car nous sommes dotés d’une conscience et d’une capacité de réflexion et de décision. Garder espoir dans la jeunesse d’aujourd’hui et de demain. Garder espoir dans le monde adulte d’aujourd’hui. Car des solutions existent. Les éducateurs, les élus, les parents, les enseignants, sauront-ils les entendre, les comprendre, les essayer ? Il est plus tard que tu ne penses, ajoutait Gilbert Cesbron, en fin d’un beau roman. Et Nietzsche d’écrire et de rappeler que « l’enfant est le père de l’homme » [17] A quand la longanimité[18] et l’écoute du silence dans les programmes scolaires ?

Références bibliographiques.

Ansembourg(d’)T. (2009), Etre heureux n’est pas nécessairement confortable, éd.de l’Homme). [Lire aussi Cessez d’être gentil, soyez vrai (éditions de l'homme 2014                                     Bouquet-Rabhi,S.(2011) La ferme des enfants, une pédagogie de la bienveillance. Actes Sud.                                                                                                                                                                 Filliot, P. (2011) L’éducation au risque du spirituel. Desclée de Brouwer.                                                                                                                                                                                               Flack, M. et Coulon, J. (2005) Le yoga en milieu scolaire : des enfants qui réussissent. (Edit. Desclée de Brouwer, Paris).                                              .                                                         Lheureux G. (2014) Education morale et éthique scolaire hier, aujourd’hui et demain. Edit. Harmattan) Sous-titre: « Éthique minimale et spiritualité laïque comme alternatives ?                            Loeffel, L.(2009) Enseigner la démocratie Nouveaux enjeux, nouveaux défis. A. Colin, Paris.                                                                                                                                                           Ogien, R. (2002) L’Éthique aujourd’hui. Maximalistes et minimalistes. Folio-Essais.                                                                                                                                                                      Ottavi, D. (2003) Intervention et Article « La disparition de la morale est- elle une fatalité » cf. Colloque Ushui de Paris, et Actes : Éthique et éducation. L’Harmattan                                      Prairat, E. (2010) L’autorité éducative, déclin, érosion, ou métamorphose. Editions Presses Universitaires de Nancy.                                                                                                                   Rosenberg, M. (2011) Parler de paix dans un monde de conflits (Jouvence, Genève)                                                                                                                                                                          Tollé E. (1995) Le pouvoir du moment présent (Éditions Ariane)


[1] 320 instituteurs et professeurs des Ecoles de France ont répondu à toutes les questions d’un questionnaire national précisant leurs options et leurs choix dans les stratégies éducatives et pédagogiques proposées

[2] L’apprentissage de la démocratie, Laurence Loeffel, (Armand Colin, 2007)

[3] Rédigé par un stagiaire CPE, Rudi Viala, ce mémoire est disponible sur les annales du CRDP de Montpellier, et a pour titre Accompagner tous les élèves au travers de la formation des délégués de classe.

[4] Viveret Patrick est philosophe et ex-conseiller à la Cour des Comptes. En tant qu’auteur il a notamment écrit : Reconsidérer la richesse (Éditions de l’Aube) & La Cause Humaine, du bon usage de la fin d'un monde (Éd. Les liens qui libèrent).

[5] Ces écoles -E.I.P.-  sont au nombre de 60 en France et 2500 en Suisse.

[6] Pierre Rabhi a développé la philosophie de la sobriété qui rend la vie plus équilibrée dans son ouvrage : La sobriété heureuse (Actes Sud)

[7] Flack M.,et Coulomb J. (2005): Le yoga à l’école, des enfants qui réussissent.(Desclée de Brower, Paris)

[8] Snel Eline, (2012) : Calme et attentif comme une grenouille. (Éditions Les Arènes).

[9] Tollé Eckart, (2011) L’Art du calme intérieur (éditions J’ai lu). Cet écrivain est un philosophe allemand.

[10] Tollé E. a publié un livre sur l’importance du moment présent s’est vendu (en 145 langues) à 3 millions d’exemplaires (cf. bibliographie)

[11] Rosenberg Marshall, (1998) Les mots sont des fenêtres, éditions La Découverte, (Genève), livre essentiel sur la CNV.

[12] Ansembourg (d’) Thomas, Etre heureux n’est pas nécessairement confortable, éditions de l’Homme, 2009. TDS est maintenant le responsable CNV de toute l’Europe. Autre livre : « Cessez d’être gentils et soyez vrais »(2014, Edit. de l’Homme)

[13] Faure Jean-Philippe, éditions Jouvence, est un formateur et enseignant CNV en Suisse. Ses ouvrages vont dans le sens d’une éducation qui vient du cœur et privilégient la formation du comportement à l’accumulation des savoirs. Exemple : « L’empathie, le pouvoir de l’accueil » (Jouvence, 2013)

[14] Foucault définit la rhétorique comme un discours que l'on dit mais que l'on ne pense pas : le rhéteur ne dit ce qu'il pense.

[15] Mais aussi les inspecteurs, formateurs, administrateurs, qui pourraient apprendre l’Éveil aux Valeurs Humaines (EVH).

[16]  Stiegler B. (2006) aux éditions Flammarion. Cet ouvrage que tous les éducateurs de maternelle à l’Université, de la crèche à la formation des adultes, tous ceux qui travaillent avec des enfants pourraient lire avec attention, rigueur et approfondissement, dénonce l’addiction de la jeunesse aux écrans, esclavage qui prive de liberté et de démocratie en devenant des aliénés aux marchands de programme.

[17] Nietzsche a rendu cette phrase célèbre. Dans sa version banale, « L’Enfant est le Père de l’homme » était une formule initialement exprimée dans un poème Anglais de Wordsworth (1770-1850) ; elle fut reprise comme base dans la théorie de l’existentialisme, encore plus péremptoire chez Freud, car il aurait affirmé pendant une conférence que « l’enfance forge la personnalité de l’homme. »

[18] Longanimité signifie patience, indulgence et bienveillance réunies.